La Chartreuse du Liget est un lieu tout à fait original car il constitue un ensemble religieux un peu isolé des autres fonctions cartusiennes en France. La plupart des fonctions sont situées dans les Alpes autour de la Maison Mère, dans le massif de la Grande Chartreuse près de Grenoble. Les autres fondations suivent un axe qui part de Grenoble et qui se prolonge vers Londres. Le Liget est la seule fonction en région Centre et au Sud Ouest de la Loire.

Au XIII^e siècle, il existait 46 chartreuses pour 530 abbayes cisterciennes. 100 fondations supplémentaires se sont ajoutées au XIV^e siècle, puis 40 au XV^e siècle. L’ordre atteint son apogée au XVI^e siècle, à la veille de la Réforme protestante.

La chartreuse du Liget est un ancien monastère de chartreux au cœur de la Touraine Sud. Fondée vers la fin du XIIe siècle par Henri II Plantagenet, roi d’Angleterre et comte d’Anjou, elle est le seul monastère cartusien présent en Touraine. Comme le veut la règle cartusienne, La Chartreuse se compose d’une maison haute au Liget et d’une maison basse à la Corroirie. L’ensemble du Liget compte également une chapelle isolée dans une clairière de la forêt de Loches, là où se sont installés les premiers moines qui fondent l’ermitage.

La chartreuse prend une grande importance au Moyen Âge malgré une histoire mouvementée marquée par la Guerre de Cent Ans et les guerres de Religion. La Chartreuse est attaquée en 1361 par des troupes anglo-saxonnes en débandades. Les Chartreux se réfugient un temps à la Corroierie puis s’installent jusqu’en 1431 dans une maison qu’ils possèdent dans la cité royale de Loches. A leur retour, ils obtiennent du roi l’autorisation de faire ériger une enceinte tout autour de la Maison Haute.

Un vaste programme de reconstruction et d’agrandissement de la maison haute vient à peine d’être mis en œuvre lorsqu’il est interrompu par la Révolution française.

En 1791, les pères et frères chartreux sont sommés de quitter le Liget. Le mobilier, la bibliothèque riche de 6 900 ouvrages et les 150 œuvres d’art sont dispersés. De nombreux éléments de mobilier, des tableaux sont déplacés après la Révolution à Tours, à Loches, à Chemillé-sur-Indrois, à Nouans les Fontaines… Les bâtiments (le monastère, la Corroirie et la chapelle Saint-Jean) sont vendus comme biens nationaux et tout ou partiellement détruits.

Dans un souci de sauvegarde, le 6 août 1837, Cosme Edmond de Marsay acquiert la Chartreuse du Liget préservant ainsi d’une destruction éminente ce magnifique écrin de tuffeau et de verdure. Aujourd’hui encore, ce sont ses descendants qui en assurent la conservation.

Au XXIe siècle, la maison haute du Liget conserve encore un magnifique et imposant portail du XVIIIe siècle, de nombreux bâtiments et dépendances qui datent de la reconstruction de 1787 comme les vestiges du grand cloître, les ruines de son église du XVIIe siècle et un mur de défense renforcé d’une tour de guet de l’époque médiévale. De 1862 à 2015, la chapelle Saint-Jean, la Corroirie et la maison haute sont progressivement classées, inscrites et protégées au titre des monuments historiques. En 1947, la maison haute est intégrée, comme la Corroirie et les abords de ces deux groupes de bâtiments, à un site classé dans le cadre de la loi du 2 mai 1930.

La maison haute, lieu d’élévation spirituelle, est le lieu où l’on tente de concilier la vie d’ermite et la vie communautaire. C’est dans le grand cloître que vivent les 11 Pères au départ (18 vers 1787). Chaque Père se voit doté d’une maison-cellulaire dans laquelle il vit reclus. Jusqu’en 1628, le Père se fait à manger seul. A partir de cette date, on leur apporte leur repas par les passe-plats qui sont percés à ce moment. Au centre de ce cloître, se tient le cimetière des Pères et des Frères.

Chaque cellule est complétement indépendante. Il s’agit d’un pavillon entouré d’un jardinet. Tous les pavillons sont reliés à l’étage par une coursive en bois qui fait le tour du cloître et qui aboutit dans la cellule du Prieur. Au rez-de-chaussée, se trouve un atelier. Au premier étage, une chambre jouxte une salle de prière. Chaque cellule est ainsi un ermitage. Les Pères qui arrivent au Liget ont entre 20 et 24 ans. Ils sont issus de la bonne bourgeoisie tourangelle ou orléanaise. Ils ont fait don de leurs biens à l’Ordre. La vie des Pères se passent donc dans les cellules. Une fois par semaine ils partagent le repas avec les Frères, suivent l’office dominical et ont le droit à une période spaciement l’après-midi (promenade de 4 heures où les Pères et les Frères peuvent parler entre eux).